11 ans en Afghanistan : FIASco pour la FIAS

Afghanistan : FIASco pour la FIAS

L’Afghanistan célèbre aujourd’hui un bien triste anniversaire : celui d’une guerre supplémentaire, celui de 11 années de guerre menée par la coalition Etats-Unis-OTAN.
En ce 08 octobre 2012, triste jour d’anniversaire, l’heure du bilan a sonné.

L’Afghanistan célèbre aujourd’hui un bien triste anniversaire : celui d’une guerre
supplémentaire, celui de 11 années de guerre menée par la coalition Etats-Unis-OTAN.
Personne ne l’a oublié. C’est à la suite des terribles attentats terroristes perpétrés par Al-
Qaida le 11 septembre 2001, qu’une intervention armée fût lancée en Afghanistan sous le doux nom de « liberté immuable ». Peu de temps après, l’OTAN s’est engagée sur le théâtre afghan avec la création et l’envoi de la FIAS (Force Internationale d’Assistance et de Sécurité). 140 000 hommes de plus de 48 nations vont ainsi se donner pour mission de poursuivre les terroristes et d’aider le gouvernement afghan à établir son autorité sur
l’ensemble du territoire.

En ce 08 octobre 2012, triste jour d’anniversaire, l’heure du bilan a sonné.

Parmi les objectifs de l’Alliance Atlantique, le plus important reste celui de l’”Afghanisation”. Ce processus correspond à la transmission de la responsabilité de la sécurité de nos forces étrangères à l’Afghanistan, c’est-à-dire la formation des soldats et de la police afghane. Cet objectif semble voué à l’échec et les raisons en sont nombreuses.

Tout d’abord, l’OTAN n’a pas anticipé la nouvelle stratégie des talibans. Ceux-ci se sont
infiltrés parmi les nouvelles forces afghanes et espionnent, informent et sabotent les
opérations. Ils ont été jusqu’à ouvrir le feu et tuer 51 des soldats de la coalition en 2012.
C’est pourquoi l’Otan a décidé, le 19 septembre dernier, de limiter ses opérations avec
les forces afghanes. En conséquence, la FIAS, et donc les militaires belges, ne peuvent plus aller sur le terrain en Afghanistan.

De plus, cette nouvelle armée afghane doit également faire face à des désertions qui limitent ses capacités. La situation est même catastrophique: sur les 25 000 hommes recrutés de 2003 à 2005, 18 000 ont déserté !

L’Afghanisation apparaît donc pour le moment plus que fragilisée. Désormais, la question est de savoir combien de temps la force armée afghane infiltrée, dont la qualification et l’expérience est inégale à celles des forces de la FIAS, va résister aux talibans une fois les alliés partis.

A côté de cet échec, nous constatons également que les talibans restent très actifs sur le
terrain. Les attaques suicides spectaculaires, les bombes artisanales placées sur les routes, les vagues d’offensives contre les forces afghanes et contre les troupes occidentales persistent dans tout le pays. Au total, depuis le début de cette année 2012, 323 soldats de l’OTAN ont été tués en Afghanistan, poussant ainsi la FIAS à se retrancher dans ses bases.

Les faits sont là ! Il semble que l’intervention occidentale n’est pas parvenue à affaiblir les
talibans. L’échec de l’Afghanisation et la persistance des talibans renforcent les obstacles à la stabilité et au développement. Ces obstacles demeurent multiples : l’insurrection, l’impunité, la corruption (l’Afghanistan est classé quatrième pays le plus corrompu au monde), la criminalité, etc. Par conséquent, les grandes multinationales hésitent à investir dans le pays.

En outre, l’Afghanistan demeure mondialement l’un des pays les plus pauvres. L’Indice de Développement Humain place l’Afghanistan à la 172ème place. L’espérance de vie moyenne y est de 48 ans. Le taux de mortalité des nourrissons et des enfants de moins de cinq ans, ainsi que le taux de mortalité maternelle sont parmi les plus élevés au monde. Enfin, l’Afghanistan génère environ 90% de la production mondiale d’opium.
Au vu de ces constatations, il est évident que l’interventionnisme sous couvert de « guerre humanitaire » perd toute crédibilité.

Les civils restent les premières victimes du conflit. En 2011, plus de 3000 civils en sont
morts, soit autant que le nombre de soldats de la FIAS ayant péri en Afghanistan sur plus de dix ans de guerre. Ce sont les opérations aériennes, auxquelles participe la Belgique, qui sont responsables du plus grand nombre de victimes civiles du côté des forces pro-gouvernementales.

Pour ce qui est du retrait, il avait été fixé à fin 2014 lors du dernier sommet de l’OTAN à
Chicago en mai 2012. Mais l’OTAN a dû et doit encore faire face au retrait anticipé de pays jouant un rôle majeur au sein de la coalition, dont les Pays-Bas, le Canada, la Grèce et la France. La Belgique a déjà rapatrié une bonne partie de ses soldats. Il semble qu’aucun pays ne désire être le dernier à patauger dans le bourbier afghan.

Mais l’après 2014 ne marquera pas pour autant la fin de la guerre. L’OTAN pourrait encore rester bien plus longtemps en Afghanistan. En effet, elle prévoit une force de 10 000 à 20 000 hommes, des moyens aériens et des forces spéciales, un soutien technique à l’armée afghane et une aide de 4,1 milliards de dollars. De plus, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils resteraient en Afghanistan jusqu’en 2024 afin de contrôler les talibans. Quant à la Belgique, elle a déjà été sollicitée au nom du “partage du fardeau” entre les alliés.

Mais quelles sont les modalités de ce soutien pour l’après 2014 ? Au sein du parlement
fédéral, les désaccords persistent. L’aide ira-t-elle au développement ou au renforcement militaire ? Ce débat parlementaire est à suivre.

Excepté l’Otan, tout le monde s’accorde à dire qu’après 11 années de guerre, la situation en Afghanistan est dans l’impasse. Le gouvernement Karzaï, très fragilisé, pourrait s’effondrer dans les années qui suivront le retrait massif des troupes occidentales. La situation de l’Afghanistan après 2014 est donc tout sauf claire.

Après un tel bilan, il est légitime de se poser des questions : L’Otan a-t-elle réellement apporté la stabilité et la sécurité en Afghanistan ? L’Otan a-t-elle amélioré la vie des Afghans? L’Otan a-t-elle supprimé toute menace terroriste ? Devions-nous nous engager dans ce conflit ? Quels étaient les réels objectifs de l’Otan ?