Voici une lettre ouverte que, parmi de nombreuses associations, nous avons fait publier sur plusieurs grands médias francophones et flamands, début de ce mois d’août. Parmi les signataires: Vredesactie, ABP, Solidarité Socialiste, Intal, Palestina Solidariteit, Leuvens Actieplatform Palestina, Vrouwen in het Zwart Leuven, Vrede, Broederlijk Delen, Agir pour la Paix, GAPP, FOS, 11.11.11,…
Il pleut des bombes sur Gaza. Les gouvernements européens sont très forts pour déplorer les morts civils et ensuite étaler leur impuissance. Mais le siège israélien de la bande de Gaza n’est possible que parce que la communauté internationale le permet. Pour faire tourner la machine de guerre quasi chaque pays doit, après quelques jours, faire appel aux moyens logistiques venant de l’étranger. Cela s’applique aussi à Israël. Nous pouvons en faire le constat concernant le siège en cours dans la bande de Gaza.Il n’y a pas d’appui logistique au Hamas dont la capacité militaire est relativement insignifiante par rapport à celle de l’armée israélienne. Israël par contre peut compter sur un approvisionnement continu de munitions et de carburant et dispose donc d’une force militaire à laquelle les factions armées palestiniennes ne peuvent se mesurer.
Sans approvisionnements de l’étranger, les avions de combat seraient restés au sol depuis longtemps sur les bases militaires israéliennes.
La Belgique joue aussi un rôle dans cette logistique vitale pour la machine de guerre israélienne. L’approvisionnement en munitions pour l’armée israélienne se fait en grande partie via les avions de sociétés aériennes israéliennes. Cet approvisionnement vient des Etats-Unis, mais les avions atterrissent souvent à l’aéroport liégeois de Bierset pour se ravitailler en carburant. El Al, la société aérienne israélienne, y tient le rôle principal mais il est probable que CAL Cargo Airlines, qui emploie l’aéroport liégeois comme nœud aérien international, y contribue. Il n’y a aucune transparence concernant les marchandises qui passent par Bierset, mais nous pouvons supposer avec raison que ce traffic peut être considérable.
Autrefois, avant de déménager vers Bierset, El Al faisait escale à l’aéroport néerlandais de Schiphol. En 2005 et 2006, plus de 160 millions d’amorces explosives, 17 millions de pièces d’armement et plus d’un million de cartouches, de grenades fumigènes et de détonateurs ont été délivrés par les Etats-Unis à l’armée israélienne en passant par Schiphol. Ce matériel militaire a été utilisé par Israël au Liban, tuant plus d’un millier de personnes. La société aérienne israélienne El Al n’a pas apprécié la transparence du gouvernement néerlandais concernant la nature des transports. C’est pour cette raison qu’elle a déménagé vers Bierset. Dès lors qu’on n’a pas de données claires concernant le passage de matériel militaire, on peut présumer qu’une partie passe par l’aéroport liégeois. En effet, contrairement à la réglementation néerlandaise concernant le trafic d’armes, la Belgique ferme les yeux sur le transport de matériel militaire si ce matériel ne subit pas un transbordement vers un autre moyen de transport.
La Belgique choisit l’impuissance en prétendant qu’elle ne sait rien. Pourtant, le gouvernement régional wallon est compétent et peut agir pour interdire le transport. L’information nécessaire est disponible auprès de l’administration aérienne qui reçoit une liste des chargements pour chaque vol transportant de l’armement, comme l’exigent les régulations concernant le transport de marchandises dangereuses.
Avec un peu de volonté politique, l’UE, et donc aussi la Belgique, peuvent jouer un rôle déterminant dans le siège israélien de la bande de Gaza, ce qui pourrait éviter des victimes civiles. Cela peut se faire en mettant fin à l’approvisionnement en matériel militaire et en tout autre matériel pour faire la guerre aux parties combattantes, ou au moins en mettant des entraves à ces transports. Pour le Hamas, l’embargo existe déjà depuis longtemps. Vu le grand nombre de victimes civiles suite aux bombardements par Israël, il serait logique de soumettre aussi Israël à un embargo sur les armes, d’autant plus que la colonisation israélienne du territoire palestinien est à la base du conflit.
En 2009, durant un autre siège israélien de la bande de Gaza, la Belgique a déjà fait un pas important par sa décision de “ne pas donner de licences d’armes qui pourraient renforcer la capacité militaire des parties combattantes”. La Belgique peut plaider au sein de l’UE pour en faire une politique européenne, par une application stricte des critères pour le transport d’armes comme inclus dans le point de vue 2008/944. Ce point de vue prévoit entre autres que les licences d’exportations doivent être refusées “s’il existe un risque manifeste que le destinataire envisagé utilise la technologie ou les équipements militaires dont l’exportation est envisagée de manière agressive contre un autre pays ou pour faire valoir par la force une revendication territoriale”, ou quand le droit humanitaire international est violé.
C’est pourquoi nous demandons que le nouveau gouvernement confirme cette décision de 2009 en ce qui concerne Israël et inscrive également un renforcement de la législation concernant l’exportation d’armes comme priorité de la politique européenne. De plus, nous demandons aux différents gouvernements régionaux, et spécifiquement au gouvernement wallon en ce qui concerne Bierset, d’être transparent en ce qui concerne tout transit de matériel militaire et de mettre fin à tout transport de matériel militaire vers Israël.
Chers responsables politiques, engagez-vous pour mettre fin à la coopération logistique avec des pays en guerre. Les civils palestiniens n’ont rien à tirer de déclarations larmoyantes, ce dont ils ont besoin c’est de changements structurels. En mettant fin à la livraison d’armes, nous pouvons apporter une contribution significative.